Un champagne
est le résultat de 3 à 15 ans (ou plus pour certaines grandes cuvées) de
travail, de soins attentifs et de choix techniques. Il serait dommage, voire
prétentieux, de balayer ces mois d’efforts
par un jugement hâtif et définitif.
La très
grande majorité des champagnes sont des assemblages de plusieurs années, pour
garantir une régularité de la qualité de chaque cuvée au dégustateur. Les
champagnes millésimés ne sont élaborés que lorsque le potentiel du raisin est
exceptionnel. Une année peut être globalement médiocre, mais un secteur ou une
parcelle particulière peut justifier l’élaboration d’un champagne millésimé.
Pour bien
déguster un champagne, quelques conditions doivent être réunies :
Lors de la
dégustation, tous les sens sont mis à contribution :
L’OUÏE
Lors de
l’ouverture de la bouteille, plus ou moins festive, se concrétisant par un
bruit caractéristique, allant du soupir d’aise à la détonation, et nous
informant déjà sur la personnalité du champagne … et du serveur. On apprécie
également le doux bruit de l’effervescence, qui peut être tonique, exubérante,
ou au contraire sage ou raffinée, lorsqu’on verse délicatement le champagne
dans la flûte.
LA VUE
On commence
par regarder le coffret, le flacon et son habillage.
La mousse
immaculée qui monte rapidement puis redescend tranquillement sollicite déjà les
papilles et fait saliver. On observe sa limpidité, sa brillance, sa teinte qui
peut aller du doré intense à l’or pâle, avec plus ou moins de reflets verts, en
fonction de la présence de chardonnay dans l’assemblage. La finesse de ses
bulles et leur abondance sont importantes. La présence d’un cordon de bulle
autour du verre, sa persistance et sa délicatesse sont autant d’informations à
ne pas négliger. Des larmes, signes de générosité, sont même parfois observées.
LE NEZ
On sent le
vin une première fois, lentement, avec attention. On fait tourner le champagne
dans la flûte pour exalter les arômes, et on le hume à nouveau. On essaie
d’appréhender sa respiration, son intensité, sa complexité, son énergie …. On
tente de percevoir le registre de ses fragrances :
Fruité ?
Floral ? Pâtisserie ? Brioche ? … Les cépages dévoilent leur caractère, qui
évolue aussi avec le terroir et l’âge du champagne. Il est ainsi possible que le
chardonnay «pinote», ou que le pinot «chardonne». Ici, la règle est la patience
et la concentration. Il faut essayer de trouver … Les parfums ressentis sont
quelques fois changeants, fugaces, ce qui est souvent le propre des grandes
cuvées. Il n’y a pas de vérité, et la moindre influence extérieure, la moindre
parole prononcée peut nous influencer… Mais l’essentiel est ailleurs, dans
l’intensité du plaisir ressenti.
LA BOUCHE
Ici la
logique nous fait différencier le début (l’attaque), le milieu et la fin.
Est-ce qu’on déguste un champagne vif, minéral et élégant, ou plutôt rond,
ample, intense ? Ici aussi, on pourra parler de complexité. On fait tourner
longuement le champagne dans la bouche. On recherche les saveurs, mais aussi
les parfums, perçus par voie rétro-nasale. On s’émerveille, plus rarement,
d’une belle surprise, d’une pépite, d’un champagne atypique. On pourra enfin
apprécier la longueur en bouche, c’est-à-dire, la persistance dans la bouche,
une fois qu’on a avalé la gorgée.
Une fois toutes
ces étapes réalisées, on essaie de faire la synthèse de ses sensations, d’avoir
une vision globale du champagne dégusté, d’imaginer les mets qui se marieront
le mieux avec lui.
On compare
ensuite forcément aux autres champagnes que l’on a déjà goûtés. Mais là, plus
on acquiert d’expérience, plus le risque est grand de se poser en juge, de
porter un avis tranché et définitif sur la «valeur» du champagne dégusté. La
tentation est grande de classer, hiérarchiser, et pourquoi pas de mettre une
note. Il faut éviter à tout prix cet écueil, pour ne pas passer à côté de la
cuvée, mais aussi du plaisir, d’émotions parfois troublantes et déroutantes. Il
paraît beaucoup plus important d’essayer de comprendre pourquoi les champagnes
sont si différents les uns des autres, de tenter d’appréhender les démarches
techniques (viticoles et œnologiques), spirituelles parfois, des élaborateurs.